Une ville à l'échelle humaine
Le projet Midt i Verden // Midt i Nuuk s’inspire des quatre principes de Gehl pour offrir une ville à l’échelle humaine, soit par la ville animée, sûre, durable et saine. Ils sont jugés comme étant primordiaux pour aspirer à une proposition bien plus ancrée dans les valeurs culturelles des habitants. En s’inspirant de visées plus larges, «[les designers urbains et architectes] s’attaquent au défi beaucoup plus important d’offrir aux citadins la possibilité d’entrer en contact direct avec la société qui les entoure» (Gehl 2010). En développant des qualités fonctionnelles et sensibles fondées sur ces principes, on assure une réponse directe à la recherche identitaire qui fait de Nuuk un contexte de développement unique.
Midt i Nuuk (2011)
UNE VILLE ANIMÉE
Le concept fondateur qui permet d’aspirer à une ville animée est la possibilité de l’espace urbain de s’autoalimenter. «Les gens vont là où il y a du monde» (Gehl 2010), mais pour qu’il y ait du monde, il doit y avoir des espaces publics conçus pour créer une véritable effervescence de l’animation urbaine. On constate que l’entièreté des bâtiments prévus dans le projet ceinture des espaces publics collectifs offrant différentes échelles et différentes fonctions. Ainsi, non seulement cela permet d’assurer une expérience collective riche, mais aussi de la relier directement aux différentes fonctions des bâtiments. La relation entre intérieur et extérieur est soigneusement réfléchie au rez-de-chaussée. Dans un contexte nordique, les espaces protégés et intérieurs doivent faire partie intégrante de l’espace public. Ce prolongement assure la continuité autrement des activités sociales même si la météo n'est pas clémente.
En outre, les espaces sont délimités par les façades rythmées et permettent des lieux où il est possible de s’arrêter, faire une pause, discuter. Les concepteurs du projet ont également tiré profit de l’espace central dans lequel s’insère le projet afin d’obtenir une densité appréciable d’activités, mais aussi de services et d’habitants. Ainsi, attirer la population entière de la ville pour se divertir ou se cultiver exacerbe ce sentiment de communauté souhaité. De concentrer de tels services et lieu de divertissement dans un espace concis rentabilise les déplacements qui peuvent être ardus en hiver; les trajets sont courts et le piéton joint l’utile à l’agréable. Par la multiplication des espaces publics, le projet assure des lieux d'échanges qui pourraient venir raviver l'identité urbaine. (Villes en crises?, 2007)
Midt i Nuuk (2011), modifié par les auteurs (2015)
Espaces publics diversifiés
Midt i Nuuk (2011), modifié par les auteurs (2015)
UNE VILLE SÉCURITAIRE
«Pour que les citadins occupent l’espace urbain, il est essentiel qu’ils s’y sentent en sécurité» (Gehl, 2010). Comme il l’a été élaboré dans la section sur la crise identitaire, un des grands enjeux de la communauté inuit à Nuuk est la violence omniprésente qui crée un sentiment d’insécurité partagé par l’ensemble de la population (Bjerregaard et Kue Young, 1998). Outre la sécurité piétonne assurée par la hiérarchisation des circulations, la sécurité de la ville peut être améliorée en «concevant judicieusement la multitude d’aménagements qui la façonne» (Gehl 2010). Plutôt que de refermer les espaces privés et semi-privés sur eux-mêmes pour aspirer à une surprotection des lieux, ouvrir les espaces sur les autres et rendre la limite entre privé et public claire tout en s’inspirant des valeurs traditionnelles quant au rapport au sol vient renforcer le sentiment de sécurité dans l’espace urbain. Le passage en douceur de la sphère privée à l’espace public par des seuils et des dénivelés subtils permet le respect du caractère privé et sécuritaire des habitations. Les façades ouvertes et les immeubles vivants sont d’autres aspects qui participent à caractériser les espaces publics et témoignent du caractère accueillant de la ville. Également, les axes de circulation douce clairement identifiés et lisibles augmentent la limpidité du lieu tout en assurant une variété appréciable; le champ de vision social est respecté (100m), mais les impasses et les perspectives aveugles éliminées. En somme, il importe de préciser qu’il est prévu – et primordial - dans le projet de réintégrer dans les nouveaux bâtiments les familles temporairement expropriées. De plus, une grande mixité des modes de tenure a pour but de diminuer les inégalités sociales et d’empêcher la gentrification du secteur. On vise la sécurité et le bienêtre de tous, sans discrimination permettant d'augmenter le sentiment d'appartenance. (Villes en crises?, 2007)
Midt i Nuuk (2011)
UNE VILLE DURABLE
Dans la société actuelle, la question des énergies fossiles est plus actuelle que jamais. À cet égard, «accorder une plus grande priorité aux piétons et aux cyclistes pourrait […] constituer une composante importante d’une politique générale de durabilité.» (Gehl 2010). En concentrant les voitures et le réseau de transport en commun aux extrémités de la zone de projet, on libère énormément d’espace avec des axes piétons et cyclistes davantage à l’échelle des espaces publics, en plus de limiter la pollution environnementale et sonore à proximité des bâtiments. D’ailleurs, le système de transport en commun déjà présent est renforcé pour assurer une grande connectivité avec les autres secteurs de la ville. La durabilité sociale est inhérente, alors qu’on assure l’accessibilité égale à l’espace urbain pour tous les groupes. En somme, tous les aspects d’un design urbain et d’une architecture nordique sont considérés afin de permettre une durabilité dans le temps (rugosité aux vents, trajets courts, accumulations de neige contrôlées, etc.)
UNE VILLE SAINE
L’enjeu du mode de vie de plus en plus sédentaire de ces communautés autrefois mobiles rend le quatrième principe de Gehl sur la ville saine particulièrement à propos. Alors que les emplois demandent de moins en moins d'être actifs, la population de Nuuk (particulièrement les Inuit) peine à effectuer un minimum d’activité physique pour maintenir un mode de vie sain (Bjerregaard et Kue Young, 1998). Encore pour ce principe, c’est l’instauration d’un réseau efficace de sentier piéton et de pistes cyclables à même le projet qui encourage fortement l’activité physique, en plus de rendre le quartier plus sécuritaire en l’animant. La grande proportion d’installations sportives intérieures et extérieures permet également au plus jeunes de rester actifs, tout en favorisant les liens sociaux au sein de la communauté.
